Saint-Gobain, innovant depuis 350 ans
D'un monopole royal au leadership international
En octobre 1665, la création de la « Manufacture royale des Glaces » à Paris est décrétée par lettres patentes signées de Louis XIV. Un privilège qui permet de bénéficier pour vingt ans renouvelables de mesures de protection, d'exemptions fiscales et de commandes royales. L'initiative vient du Ministre Jean-Baptiste Colbert qui souhaite mettre fin à l'hégémonie du verre vénitien. C'est par fusion avec une concurrente, la Compagnie Thévart, qu'elle deviendra celle qu'on connaît encore 350 ans plus tard comme Saint-Gobain. Le nom vient du village au Nord-Est du royaume (aujourd'hui dans l'Aisne) où est installée la glacerie en question. Si au départ, les manufactures françaises courent désespérément après le savoir-faire italien jalousement gardé par ses spécialistes, elles comprennent vite qu'il va falloir innover par elles-mêmes. Et c'est justement à Saint-Gobain qu'est inventé un premier procédé révolutionnaire : le coulage du verre sur table. Il permet de réaliser des glaces de grande dimension. D'autres techniques et inventions suivront qui jalonneront l'histoire du verre, de la construction et de l'entreprise au fil des siècles. De superbes réalisations pour des gares, des grands magasins ou encore des palais d'expositions universelles feront la réputation de la France et de Saint-Gobain. Longtemps concentrée sur les glaces, l'entreprise se diversifie à partir du XXe siècle. Ses développements et conquêtes sont finalement depuis ses débuts le fruit d'une double stratégie : des efforts de recherche et innovation internes d'un côté et une politique de rachats et acquisitions de l'autre. Les deux permettant au groupe, entré depuis le XXIe siècle dans l'ère de l'habitat durable, de se maintenir comme un leader mondial incontesté du secteur.
Innovation et protection : un habile géant.
Saint-Gobain innove pour devenir leader mais aussi pour le rester : un produit sur quatre proposé aujourd'hui n'existait pas cinq ans auparavant. Une stratégie qui demande évidemment des moyens adaptés : la R&D est organisée autour de nombreux centres dont sept principaux en recherche transversale et internationale - trois en France et les quatre autres en Allemagne, Chine, Inde et États-Unis. Elle occupe 3 700 salariés et représentait en 2014 un investissement de 400M€. La stratégie de propriété intellectuelle, elle, ne peut pas être appliquée de manière unique et centralisée : avec ses trois grands pôles regroupant chacun plusieurs activités qui proposent eux-mêmes différents produits, marques et technologies, le groupe international opère sur de nombreux marchés.
C'est au niveau des pôles que sont décidées les stratégies les mieux adaptées à l'environnement économique et concurrentiel. Si certaines activités utilisent par exemple le brevet essentiellement comme droit d'interdire, d'autres voient dans le licensing une habile manière de se développer : à partir des années 1960, Saint-Gobain a installé un réseau de franchisés dans le secteur de l'isolation pour développer son marché à l'international. Dans le secteur du vitrage automobile aussi, le groupe a concédé des licences pour répondre à l'exigence des constructeurs qui préfèrent avoir deux fournisseurs plutôt qu'un. La couverture géographique des brevets est elle aussi adaptée aux marchés : on privilégiera par exemple une protection très étendue pour des produits qui voyagent peu et qui sont développés sur place comme dans le secteur des matériaux de construction contrairement à certains matériaux haute performance. Les pôles s'appuient sur des spécialistes PI répartis à travers le monde. En France, un service PI transversal et rattaché à la direction R&D comprend une équipe d'ingénieurs brevets qui travaillent au plus près des chercheurs. Ils sont force de conseil en matière de stratégie et s'occupent aussi de rédiger les brevets – une tâche presque entièrement internalisée. Saint-Gobain n'hésite pas à déposer tôt des demandes de brevets, parfois sur plusieurs solutions alternatives, avant de savoir laquelle l'emportera. Une politique de dépôts systématique favorisée par l'innovation collaborative – avec des universitaires, des industriels ou des start-up – de plus en plus présente dans le groupe.
- Matériaux innovants. Il regroupe le vitrage (n°1 européen et n°2 mondial) et les matériaux haute performance (n°1 mondial). C'est 22% du CA, près de 60 000 salariés et une présence dans plus de 40 pays.
- Produits pour la construction. Il regroupe les solutions d'aménagement de l'habitat comme : le plâtre, l'isolation acoustique et thermique, les revêtements de façades, la toiture, etc. Selon les secteurs, le groupe dispute les premiers ou deuxièmes rangs mondiaux ou européens. C'est 26% du CA, près de 47 000 salariés et une présence dans 58 pays.
- Distribution bâtiment. Une activité qui s'adresse aux professionnels du bâtiment, aux particuliers comme aux entreprises et qui sert les marchés de la construction, de la rénovation et de l'aménagement. Saint-Gobain est n°1 en Europe de la distribution de matériaux de construction. C'est 46% du CA, près de 63 000 salariés et une présence dans 27 pays.