Comment injecter des licences dans son modèle économique
Crossject est un laboratoire spécialisé dans les médicaments auto-injectables dédiés aux situations d'urgence. Son produit phare est ZENEO : un dispositif d'auto-injection sans aiguille, pré-rempli et à usage unique. Une innovation protégée par plus de 400 brevets. L'une des particularités du modèle économique de la société est de reposer en partie sur la vente de licences de distribution. Le produit est alors fabriqué de A à Z et livré clé en main au client. Il s'agit de molécules libres de droit, approvisionnées auprès de fabricants de principes actifs et combinées par Crossject au dispositif ZENEO.
Mais attention, "ces licences sont extrêmement ciblées", souligne Patrick Alexandre, le fondateur de Crossject. Le contrat de distribution s'applique à un territoire donné et concerne une molécule précise associée à ZENEO. "Cela permet de limiter les fuites de savoir-faire, d'une part, et de maîtriser tout le processus de ce produit complexe, assimilé à un médicament au niveau réglementaire", poursuit Patrick Alexandre.
Illustration : en décembre dernier, Crossject a signé un accord de partenariat avec Xi'an Xintong Pharmaceutical Research, un laboratoire chinois. L'accord porte sur la Chine continentale et concerne uniquement ZENEO Méthrotrexate, une molécule préconisée pour traiter la polyarthrite rhumatoïde. Il prévoit le versement de royalties à hauteur de 25% des ventes, avec un engagement à atteindre à trois ans un chiffre d'affaires minimum de 58 millions d'euros. A ces recettes viennent s'ajouter celles provenant de la vente du médicament en tant que tel, Crossject produisant les produits concernés. "Nous proposons des produits clés en main, et sommes donc en mesure de demander des taux de royalties élevés, entre 20% et 40% en moyenne", souligne Patrick Alexandre. Au-delà de l'intérêt financier, commercialiser des licences de distribution permet de nouer des partenariats avec des laboratoires déjà investis dans l'indication thérapeutique visée, qui disposent donc d'un réseau de prescripteurs identifiés, de leur propre réseau de distribution, et qui ont accès aux organismes réglementaires et aux modalités de remboursement. "C'est donc un gain de temps évident pour nous", poursuit Patrick Alexandre. Crossject envisage également de vendre des licences d'exploitation. Dans ce cas, le client utiliserait ZENEO avec sa propre molécule qu'il fabriquerait ou ferait fabriquer.
Pour l'instant, la société a signé des contrats de distribution avec quatre licenciés pour ZENEO dont trois pour ZENEO Méthrotrexate. Avec sept produits en développement dans son portefeuille, elle espère avoir à moyen terme une vingtaine de licenciés dans le monde entier. "Le fait d'avoir un produit original et protégé nous permet de nous développer : la propriété intellectuelle est au coeur de notre modèle économique", conclut Patrick Alexandre.