Comment les entreprises peuvent-elles se prémunir contre la contrefaçon ?

07/06/2021
En France, la contrefaçon touche les entreprises de toutes tailles et de tout secteur d’activité. Les PME/TPE et les start-up sont aussi vulnérables que les grandes entreprises compte tenu de leurs ressources souvent limitées. Stéphanie Leguay, coordinatrice du CNAC pour l’INPI, revient sur les actions à mettre en place pour se protéger de la contrefaçon.

Quels sont les secteurs les plus touchés par la contrefaçon en France ?

Stéphanie Leguay : Aucun secteur d'activité n'est épargné dans l’hexagone, la contrefaçon est un fléau et ce, quelle que soit la taille de l’entreprise. Les services de la douane, partenaire de l’INPI dans la lutte anti-contrefaçon, ont saisi en France 5,64 millions d'articles contrefaits en 2020. "Vêtements, chaussures et accessoires" arrivent en tête des produits contrefaits, suivis des jeux et jouets, des équipements électroniques, électriques et informatiques puis des médicaments contrefaits en quatrième position. Aujourd’hui, les contrefacteurs ont une très bonne connaissance de notre économie et des produits que nous aimons consommer. Nous l’avons vu récemment avec la pandémie : dès mars 2020 de faux masques étaient en vente sur le net !

La plupart des responsables d’entreprises ne prennent pas suffisamment en considération ces problématiques et ne sont pas assez vigilants souvent par manque de temps, d’argent ou parfois ils accordent une trop grande confiance à des partenaires peu scrupuleux. Aussi, les entreprises doivent-elles prendre des mesures au plus tôt afin d'éviter d'être copiées et de perdre une part importante de leur chiffre d’affaires.

Le rôle du Comité national anti-contrefaçon (Cnac)

Créé en 1995, le Comité national anti-contrefaçon a pour vocation de renforcer le dispositif national de lutte anti-contrefaçon grâce à une meilleure coordination des actions des administrations et du secteur privé. L’INPI en assure le Secrétariat général et gère la promotion du dispositif français de lutte contre la contrefaçon au sein des manifestations nationales et internationales consacrées à ce sujet.

Comment les entreprises peuvent-elles se protéger au mieux ?

S. L. : On peut retenir les six points clés suivants :

  • Déposer des titres de propriété industrielle
  • Sécuriser tous les échanges avec l’extérieur
  • Mettre en place une cellule de veille (marchés physiques mais aussi internet et sur les plateformes ou les contrefaçons prolifèrent)
  • Déposer une demande d’intervention gratuite en Douanes
  • Négocier à l’amiable
  • Ne pas hésiter à attaquer le cas échéant
     

1/La meilleure façon de protéger vos innovations en France consiste à déposer une demande de titre de propriété industrielle (brevet, marques, dessins & modèles, droit d’auteur, indication géographique…) auprès de l’INPI. En donnant le monopole d’exploitation sur un titre pour une période déterminée, la propriété intellectuelle leur donne les moyens de se défendre et d’agir contre les contrefacteurs et les pratiques déloyales si nécessaire.

2/Dans le cadre de vos accords de coopération lors desquels les règles de partage de la propriété industrielle sont abordées, il est important de déterminer en amont à qui appartiendra la propriété des résultats obtenus et qui exploitera les résultats et/ou pourra éventuellement concéder les licences. La signature d’un accord de confidentialité peut également s’avérer nécessaire pour garantir la confidentialité des informations stratégiques en vue d’une collaboration.

3/Mettre en place une cellule de vieille en interne et/ou en externe pour s’assurer du respect de vos droits de propriété industrielle est un bon point de départ. Aujourd’hui, une veille sur internet est nécessaire sur les sites généralistes ou dédiés à une catégorie de produits.

Il faut aussi collaborer avec les plateformes de vente en ligne où les contrefaçons prolifèrent. Certaines ont mis en place des procédures de notification d’atteinte aux droits et des programmes « Brand Registry » qui leur permettent à la fois d’authentifier les produits qu’elles vendent et d’être notifiées en cas d’atteinte à leurs marques. Les plateformes de vente en ligne se montrent également généralement réactives face aux ordonnances d’injonction délivrées à l’encontre d’un vendeur.

Pour mieux connaître vos droits sur internet consultez : http://vosdroits.service-public.fr/particuliers/N10515.xhtml

N’hésitez pas à signaler les pratiques vous paraissant frauduleuses aux associations de consommateurs, ainsi qu’aux autorités compétentes à l'adresse suivante : www.internet-signalement.gouv.fr.

4/Cette mesure est gratuite et permet de stopper les produits contrefaisants aux frontières : « Cette procédure consiste, lors de la découverte par le service des douanes de marchandises soupçonnées de contrefaçon, soit à suspendre la mainlevée de la marchandise, lorsque celle-ci se trouve en situation de dédouanement, soit à la retenir, dans les autres cas, pendant une durée maximale de dix jours, afin de permettre au titulaire du droit de faire valoir ses droits. »

5/Si cela est possible, vous pouvez tenter une négociation amiable avec l’aide d’un professionnel (conseil en propriété industrielle ou avocat spécialisé). Il est parfois plus intéressant d’avoir recours à ce genre de transaction pour éviter un procès qui risquerait d’être long et coûteux, ou dont l’issue serait incertaine.

6/Si vous souhaitez agir à l’encontre d’un contrefacteur, vous pouvez vous rapprocher d’un avocat spécialisé en droits de propriété intellectuelle ou d’un conseil en PI, en mesure de vous aider dans des actions administratives, judiciaires et/ou douanières.

Evitez d’être vous-même contrefacteur !

Attention : avant de commercialiser un produit (en tant que fabricant ou distributeur) à bien vérifier que vous n’êtes pas contrefacteurs vous-même ! Cela peut couter très cher. Vérifiez pour chaque nouveau produit que celui-ci n’a pas déjà été déposé ou qu’il ne fait pas l’objet d’un droit de propriété industrielle ou intellectuelle.

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Comment mener une saisie de contrefaçon ?

S.L. : Pour collecter des preuves, vous pouvez faire saisir la marchandise ou des échantillons sur autorisation d’un juge. C’est un moyen efficace de prouver la contrefaçon qui nécessite le recours à des professionnels.

Autre moyen possible : déposez plainte auprès des services de gendarmerie. Dans ce cas, il faut collecter des informations complémentaires comme le volume de la contrefaçon et les  bénéfices réalisés par le contrefacteur pour évaluer les dommages et intérêts auxquels vous pourrez prétendre ; l’identification du contrefacteur ; le lieu de l’infraction (origine et provenance des produits) ; la liste des fabricants, importateurs ou distributeurs ; le moyen de transport utilisé, etc.

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