Un nouveau traité des Nations Unies relatif au droit des dessins et modèles

29/11/2024
Vendredi 22 novembre 2024, les États membres de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) ont conclu un nouveau traité relatif au droit des dessins et modèles. Ce traité marque une avancée décisive après quasiment deux décennies de négociations. Le point dans les lignes qui suivent.
Jérémie Petit (MEAE), Alice Guérinot (MEAE), Daren Tang (OMPI), Carole Bremeersch (RP Genève), Christophe Bouchart (MEAE), Abdulaziz Muhammad Al-Swailem (SAIP), Florence Galtier (INPI), Maxime Bessac (INPI)

Le traité adopté à Riyad (Arabie Saoudite) porte sur l’harmonisation et la simplification des procédures concernant les droits et pratiques en matière d’enregistrement des dessins et modèles. La Conférence diplomatique qui s’est tenue du 11 au 22 novembre 2024 à Riyad représentait la dernière étape avant son adoption. 

Pascal Faure, Directeur général de l’INPI, Florence Galtier, Directrice juridique et financière de l’INPI, Maxime Bessac, Responsable du pôle juridique de l’INPI, et Carole Bremeersch, Conseillère Propriété industrielle à la Représentation permanente de la France auprès des Nations Unies, faisaient partie de la délégation française.

Présidée par Abdulaziz Muhammad Al-Swailem, directeur de l’office de propriété intellectuelle en Arabie Saoudite (SAIP), la conférence diplomatique a été convoquée lors de l’assemblée générale de l’OMPI en juillet 2022 ; mais elle clôturait en réalité près de 20 ans de négociations.

Le nouveau traité entrera en vigueur trois mois après avoir été ratifié par quinze États (article 30 du traité).

Les textes adoptés se composent du traité à proprement parler et d’un règlement d’exécution

L’Assemblée des Parties contractantes pourra modifier les règles de ce dernier, ce qui permettra la mise en place d’un environnement dynamique, favorisant l’évolution du droit des dessins et modèles, même si la modification du traité lui-même ne pourra intervenir que par la convocation d’une nouvelle conférence diplomatique. 

 

Qu’est-ce que les dessins et modèles ? 

Les dessins et modèles renvoient à l’aspect visuel d’un produit ou d’une partie de celui-ci. Le dessin est bidimensionnel, comme un motif de surface particulier, tandis que le modèle est tridimensionnel, comme la forme d’un produit. Ils s’appliquent tous deux à un large éventail de produits, tels que les emballages, les meubles, les vêtements, les appareils électroniques, les équipements médicaux, les produits artisanaux et les bijoux. 
La protection par le droit des dessins et modèles concerne uniquement l’apparence d’un produit, et non sa fonction ou sa destination. 

Dans l’Union européenne, un dessin ou un modèle peut être protégé pendant 25 ans maximum (5 ans renouvelables 4 fois). 

 

Quels sont les objectifs du nouveau traité ? 

Les procédures relatives à l’octroi de dessins et modèles varient sensiblement d’un pays à l’autre, ce qui complique la tâche des créateurs souhaitant protéger leurs créations. 

Le traité sur le droit des dessins et modèles permettra de remédier à ce problème en harmonisant et en simplifiant les procédures de protection, tout en éliminant les lourdeurs administratives. 

 

Que prévoit le nouveau traité ?

Le traité établit des exigences minimales et maximales en matière de formalités de dépôt. 

Il n’a vocation à régir que les dépôts au niveau national ou régional, réalisés directement auprès des offices. Autrement dit, le traité ne s’applique pas aux demandes d’enregistrement internationales déposées via le système de La Haye1

Il simplifiera et harmonisera les informations que les déposants devront fournir avec leur demande, en prévoyant un cadre prévisible pour les conditions applicables aux demandes d’enregistrement.

Les États contractants devront permettre aux déposants de choisir les formes de représentation d’un dessin ou modèle qu’il souhaitent utiliser dans leur demande (à l’aide de dessins, de photographies ou, s’ils sont admis, de fichiers vidéo). Elles seront admises par les offices de propriété industrielle de manière uniforme. 

Sous certaines conditions, les États contractants devront également permettre aux déposants d’inclure plusieurs dessins ou modèles dans une seule de leurs demandes. Des garanties sont prévues en cas de refus d’un dessin ou modèle afin que cette demande soit divisée et que la date de dépôt initiale soit conservée.  

Les offices pourront attribuer une date de dépôt, en permettant aux déposants de soumettre certaines parties essentielles de leur demande plutôt qu’une demande complète. 

Le nouveau texte prévoit des mesures de sursis pour éviter que les déposants ne perdent leurs droits en cas de non-respect d’un délai. Il simplifie la procédure de demande de renouvellement de l’enregistrement d’un dessin ou modèle et encadre les inscriptions de licence et de changement de titularité. 

La possibilité de déposer une demande d’enregistrement d’un dessin ou modèle après sa divulgation publique est également envisagée, puisqu’un délai de grâce de 12 mois (article 7) est accordé à compter de la première divulgation. Pendant cette période, il ne sera pas considéré que la divulgation porte atteinte à la nouveauté et au caractère individuel du dessin ou modèle.

Enfin, le traité autorise les États contractants à exiger des déposants qu’ils indiquent des informations sur les expressions culturelles traditionnelles et les savoirs traditionnels dont ils ont connaissance et qui sont pertinentes pour l’admissibilité à l’enregistrement du dessin ou modèle.
 

Jeremie Petit, Maxime Bessac, Carole Bremeersch, Pascal Faure et Florence Galtier faisaient partie de la délégation française

Quel a été le rôle de l’INPI dans l’élaboration du traité et quel sera-t-il dans le cadre de son application ?

En amont de la conférence diplomatique, les experts de l’INPI ont contribué aux consultations des parties prenantes et à l’élaboration des positions et stratégies de négociation de la délégation française.  

Lors des deux semaines de la conférence diplomatique, l’INPI était également présent à Riyad, aux côtés du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

Enfin, l’INPI et les offices de propriété industrielle – notamment l’EUIPO – sont eux-mêmes destinataires du traité et devront mettre à jour leurs pratiques conformément à celui-ci. La mise en œuvre du traité nécessitera donc l’adoption de mesures au niveau européen et national. 

 

Quelles sont les conséquences pour la France ?

Il est important de noter qu’au niveau européen, une directive et un règlement, plus communément appelés « Paquet dessins ou modèles » et portant révision du système juridique dans l’Union, viennent récemment d’être adoptés. La directive, qui apporte un certain nombre de nouveautés, devra être transposée au niveau national dans un délai de 3 ans, tout en assurant la conformité aux dispositions du nouveau traité. 

En ce qui concerne les déposants français, une fois le traité entré en vigueur, ils devront se conformer à ses exigences lors d’un dépôt de dessin ou modèle dans chacune des parties contractantes au traité.

 

1 : L’Arrangement de La Haye régit l'enregistrement international des dessins et modèles industriels. Initialement adopté en 1925, l'Arrangement de La Haye établit dans les faits un système international – le système de La Haye – qui permet aux déposants d'obtenir la protection de leurs dessins et modèles industriels dans plusieurs pays ou régions moyennant un minimum de formalités. Pour plus d’informations : https://www.wipo.int/treaties/fr/registration/hague/index.html
 

Photo 1

De gauche à droite : Jérémie Petit (Chef du pôle Affaires économiques et Enjeux globaux, Direction des Nations unies, Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE)), Alice Guérinot (Rédactrice propriété intellectuelle, Direction de la diplomatie économique, MEAE), Daren Tang (Directeur général de l'OMPI), Carole Bremeersch (Conseillère Propriété intellectuelle à la Représentation permanente de la France auprès de l’Office des Nations unies à Genève et des autres Organisations internationales en Suisse), Christophe Bouchart (Ambassadeur, Chef de délégation, MEAE), Abdulaziz Muhammad Al-Swailem (Directrice général de la SAIP), Florence Galtier (Directrice juridique et financière de l’INPI), Maxime Bessac (Responsable du Pôle juridique de l’INPI)

Photo 2

De gauche à droite : Jeremie Petit (Chef du pôle Affaires économiques et Enjeux globaux, Direction des Nations unies, Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE)), Maxime Bessac (Responsable du Pôle juridique de l’INPI), Carole Bremeersch (Conseillère propriété intellectuelle à la Représentation permanente de la France auprès de l’Office des Nations unies à Genève et des autres organisations internationales en Suisse), Pascal Faure (Directeur général de l’INPI) et Florence Galtier (Directrice juridique et financière de l’INPI)

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